La lisibilité des conditions d’utilisation de Facebook, mise en cause par la justice française [Eclats de S.I.Lex]

Alors qu’OWNI a publié cette semaine une infographie mettant en lumière les nombreux abus des conditions générales d’utilisation (CGU) des grands médias sociaux, une décision de la Cour d’Appel de Pau, rendue à la fin du mois de mars, a mis en cause la lisibilité des clauses contractuelles de Facebook, dans un litige l’opposant à un internaute français.

Facebook Terms. Par Auntie P. CC-BY-NC-SA. Source : Flickr

C’était précisément une clause attributive de compétence qui était concernée dans cette affaire : Facebook impose en effet à ses utilisateurs que les litiges qui pourraient survenir avec eux soient tranchés par les juridictions de l’Etat du Delaware, aux Etats-Unis.

Or, si les parties a un contrat peuvent en effet désigner un juge pour régler leurs différends, le droit français impose un certain formalisme pour que de telles clauses soient valables.

L’article 48 du Code de procédure civile indique que  : « Toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins […] qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée« .

Sur cette base, la Cour d’Appel de Pau a donc dû examiner la lisibilité et l’intelligibilité des CGU de Facebook, qu’elle n’a pas jugées suffisantes pour satisfaire les exigences du droit français :

Il convient donc de vérifier si l’utilisateur qui traite avec la société Facebook s’est engagé en pleine connaissance de cause.

Il apparaît à la lecture des conditions générales d’utilisation du site, que les dispositions spécifiques relatives à la clause attributive de compétence à une juridiction des Etats Unis est noyée dans de très nombreuses dispositions dont aucune n’est numérotée.

Elle est en petits caractères et ne se distingue pas des autres stipulations.

Elle arrive au terme d’une lecture complexe de douze pages format A4 pour la version papier remise à la Cour et la prise de connaissance de ces conditions peut être encore plus difficile sur un écran d’ordinateur ou de téléphone portable, pour un internaute français de compétence moyenne.

En outre, il suffit d’une simple et unique manipulation lors de l’accès au site (clic) et non d’une signature électronique pour que le consentement de l’utilisateur soit considéré comme acquis ce qui suppose que l’attention de celui-ci soit particulièrement attirée sur la clause dont se prévaut fa société Facebook ce qui n’est pas le cas en l’espèce puisque lors de cette manipulation la clause n’est pas facilement identifiable et lisible;

Enfin, au moment de l’inscription de M. Sébastien R , Ces conditions générales n’existaient que dans une version an anglais et la société Facebook ne démontre pas contrairement à ce qu’elle prétend, que celui-ci maîtrisait cette langue.

Dès lors, il ne peut être considéré qu’il s’est engagé en pleine connaissance de cause et la clause attributive de compétence doit être réputée non écrite.

Cette décision remet fortement en cause le fonctionnement même des CGU, en critiquant par exemple le procédé de la licence-clic. Mais il faut cependant considérer que cette exigence de lisibilité est renforcée en ce qui concerne les clauses attributives de compétence, du fait des exigences de l’article 48 du Code cité plus haut, et qu’elle ne vaut peut-être pas pour l’ensemble des CGU.

Il y a cependant un domaine dans lequel le droit français est également très formaliste,  celui des cessions de droit d’auteur. Or les CGU de Facebook, comme celle de bien d’autres médias sociaux, contiennent une clause de cession de droits sur les contenus, vague et très large, qui a récemment été dénoncée en Allemagne par un juge comme abusive.

Il serait intéressant de voir l’issue d’un tel procès en France…


8 réflexions sur “La lisibilité des conditions d’utilisation de Facebook, mise en cause par la justice française [Eclats de S.I.Lex]

  1. Pour ma part, je suis venue sur Facebook un peu malgré moi. C’était en 2007 ou 2008. C’était écrit en anglais, et je ne maitrise pas cette langue, excepté le minimum de bases. Je me demande encore comment j’ai fait pour m’y inscrire! D’autre part, je ne savais pas à l’époque ce qu’était Facebook. Je n’avais pas Internet chez moi, j’allais dans un cybercafé pour faire des recherches sur le net. Ce que je désapprouve le plus, c’est qu’il est impossible de supprimer son compte, on peut le désactiver mais pas le supprimer. Et puis il faut avoir un compte pour avoir sa page pro. Voilà pour mon témoignage. Je passe pour les détails.

  2. Maintenant que Fessebouc est en bourse, chaque mot, chaque image sont exploités – c’était déjà le cas, mais d’autant plus -par des robots qui vont sortir votre profil de consommateur. J’avais du récupérer des photos via FB et 2007 ou 2008 et n’y suis quasiment jamais retourné depuis, mais étrangement ces derniers temps j’ai à nouveau reçu des relances de supposés « amis ». Mes amis ont mon courriel personnel et moi le leur et je ne pense pas qu’ils soient particulièrement intéressés par la couleur des chaussettes que j’ai achetés dernièrement

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